Avant de quitter le pire réseau que la Terre ait porté, j'y ai eu quelques demandes sur mon parcours professionnel. Et maintenant que j'ai quelques années d'expérience, je me dis qu'il est peut-être opportun de t'en parler.

Qui sait, peut-être que cela te donnera des idées, et puis, cela peut être sympa de savoir que non, tous les parcours ne sont pas identiques, ni même similaires, et qu'il n'y a pas de modèle standard.

Les études post-bac

Beaux-arts et Architecture

Clairement, je n'ai pas eu un début de parcours classique, après le bac voici que votre blogueuse part dans les calanques de Marseille pour créer des planches au format A0, équipée de Rotrings que sa voisine lui avait offerts, et suivre des cours de dessin au trait.

Oui, les beaux-arts et l'école d'archi de Luminy furent mes premiers lieux d'études post bac. Si, si.

Mais bon, même si j'adorais les beaux-arts, découper l'espace « par pans d'ombre et de lumière » ne m'emballait finalement pas plus que ça. Cela dit, on avait réalisé et monté un court-métrage architectural plutôt sympa au 2e semestre.

J'étais tellement loin de me douter que cela me servirait 3 ans plus tard.

Maths sup, Math spé FTW

Vu que ce n'était pas franchement l'amour entre les profs d'archi et moi, je décidais de me réorienter en sciences, au grand plaisir de mes profs ingés, et au grand désespoir de mes profs d'art. Et j'ai été sélectionnée à Thiers, en MPSI/MP (maths sup / maths spé), toujours dans la cité phocéenne.

Bon, deux années de science intensive, sauce élitiste, on ne va pas se le cacher, c'était une cadence infernale. Mais j'ai tenu, et même, finalement, je m'en sortais pas mal, heureusement l'anglais et la philo étaient devenues mes bols d'air dans lesquels je pouvais respirer de mes semaines de formattage aux forceps, en mode camps de conversion1.

C'était beaucoup, mais ça s'est passé, je suis allée jusqu'aux concours, et puis...

L'IMAC et l'informatique fondamentale

...Et puis une fois passés (je ne me souviens même plus des résultats) j'entends parler de l'IMAC, une école multiple, avec de l'info, de l'audio-visuel, de la communication... Bref des sciences et de l'art, enfin une combinaison des deux choses que j'appréciais. Pour entrer, pas de concours, école publique, diplôme reconnu, pas privée, pas élitiste, ouverte, avec certes peu de places, mais un dossier à monter, du coup, à y être, j'en ai monté un. Et puisque je codais un peu en parallèle de mes années maths sup / maths spé2, je m'étais même fait un site, et j'ai envoyé. Quelques semaines plus tard, on montait aux portes ouvertes avec ma tante, avant de recevoir ma lettre d'acceptation !

Je ne sais pas si cela a beaucoup changé aujourd'hui, mais c'étaient de belles études, je regrette un peu de ne pas m'être plus ouverte aux personnes que j'ai connues dans ma promo, rares sont celles qui me connaissent telle que je suis maintenant, sortie de ma coquille (si jamais vous passez par ici, coucou la promo IMAC 2017 👋).

Ce fut la dernière année, que mon prof de maths me proposa de cumuler le diplôme d'ingé web avec un master en info fondamentale, ce fut parti pour jouer avec les problèmes NP-complets et les algorithmes d'approximation.

Et ce fut aussi en parallèle du double diplôme, sans doute parce que je n'avais pas compris le sens du terme « cumulé », que j'ai décidé de me mettre en freelance3, nous sommes en 2017.

La vie pro

Freelance forever

Là c'est plus rapide, je retourne dans le sud, et je démarre à mon compte... et ce n'est pas folichon, vraiment pas. Ma première année, si j'ai pu faire 15k4 c'était le bout du monde. Et c'était parti pour durer si un de mes clients ne m'avait pas proposé un CDI sur Paris.

Je saute donc sur l'occasion, à la condition de continuer mon activité en parallèle, comme je continue de le faire avec tous mes postes aujourd'hui. Me voici donc à remonter à la capitale, pour pouvoir améliorer mon pouvoir d'achat5.

Web agency family

Me voici donc dans une agence web avec 6 personnes. C'était sympa, non vraiment c'était un cercle de personnes qui sont devenues des ami·es avec le temps et on s'invite à bouffer de temps en temps.

Niveau taff, c'était le classique du classique, WordPress au début, un poil de Drupal, un ersatz de PrestaShop (🤮 pardon, mais vraiment pas mon plat préféré) puis on agrémente de frameworks type Symfony, Laravel et autres, au fil des ans. À force, je rencontre les SI6 de nos clients et j'accroche pas mal sur leurs travaux, iels ont une appétence pour partager leurs connaissances, et j'en profite alors pour apprendre un peu plus le DDD7, le craft8 et l'urbanisme9

C'est comme ça que je commence à vouloir me changer du quotidien des CMS ou des MVC. Sauf que je m'y suis prise un peu trop vite...

L'automobile et l'aviation

Je me retrouve embauchée dans l'automobile, par le biais d'une discussion sympa lors d'un entretien. Techniquement, ce n'était pas l'entreprise la plus avancée du domaine, clairement, mais bon, leur spécialité, c'était la donnée, pas la tech. J'ai appris quand même beaucoup, puisqu'on m'a faite monter en responsabilités, une équipe à gérer, puis deux10, pendant deux ans. C'était sympa, mais pas vraiment le management auquel je m'attendais. Alors, j'ai découvert que j'étais bien capable d'encaisser ces responsabilités, mais également que je n'aimais pas forcément ce rôle. Puis le prix à payer était lourd, je prenais un temps considérable dans les transports journaliers (2h ~ 2h30 par trajet), et d'autres événements de ma vie se sont précipités, et je ne me voyais pas briser ma coquille facilement dans ces conditions11.

Sauf que, 2022, ce n'est pas qu'une année où j'ai assumé mon identité et où j'ai changé d'entreprise, c'est aussi une année où j'ai foutu une bonne partie de ma vie en l'air, pro comme perso. On parle parfois de sortir de sa zone de confort, ah bah là je te l'ai atomisée la zone de confort. La go elle a viré la moitié de sa vie, elle s'est barée d'un job en mode semi-YOLO, alors qu'elle avait un prêt en remboursement12, et elle a entamé un ménage de sa vie assez énervé, vraiment je ne sais pas où j'ai puisé cette force alors que j'entrais dans sûrement la plus grosse déprime de ma vie.

Donc je pars, sauf qu'à ce moment de ma vie, tout ce que j'avais en tête, c'était d'assumer mon genre, c'était devenu vital, plus important même que le fait d'avoir un travail13. Mais j'avais besoin de travail, et d'un qui me permette de briser l'œuf, j'embauche donc ailleurs, dans l'aviation partagée.

Là j'ai eu beaucoup de DDD, une équipe petite mais une bonne ambiance, et le principe était super sympa. Et j'ai pu entamer ma transition dans ce lieu, en toute quiétude pendant la totalité de ma période d'essai.

Sauf que.

About being yourself

Eh bien, mes trajectoires de vie récentes m'on également appris à être moi, déjà parce que pour faire une transition, et, dans mon cas, éviter de tomber en dépression, je n'avais pas le choix, mais aussi parce que cela permet de faire le ménage dans ses relations, pro comme perso14. Je commence à vouloir penser mon métier différemment et changer son sens (voir du monde, bosser réellement en équipe, etc.).

Et c'est là que j'ai pu rencontrer de belles personnes, des portes amicales se sont ouvertes en même temps que d'autres, finalement moins amicales, se sont fermées. Et l'un de ces personnes, qui m'avait permise de commencer doucement à me genrer au féminin, qui m'a acceptée telle que je suis, m'a un jour conseillée de prendre contact avec une entreprise qui recherchait. Étant donné que j'étais encore sur le réseaux de l'oiseau bleu à ce moment, je croise quelques comptes de ladite entreprise, et ce que je lis me plaît, pourquoi pas. Je postule.

Elle a eu l'œil persant ma pote ❤

Maintenant

Maintenant, je suis Thea Maeva, je bosse dans des conditions idéales pour moi, je fais du DDD en .NET, je passe mes journées certes chez moi (exit les 4h de trajets / jour) mais avec des personnes qui ont le même humour de qualité que moi. Je suis moi et j'ai un équilibre vie pro / vie perso qui est extrêmement reposant.


  1. Alors je n'ai absolument aucun scrupule à pousser cette comparaison, les CPGEs c'est quelque chose. Et je suis heureuse de ne pas en être ressortie avec une belle mentalité à la con. 

  2. Oui, j'étais timbrée, en plus de mes études MPSI/MP, je codais pour le plaisir. 

  3. Timbrée, je te dis ! 

  4. De CA, pas de salaire... 

  5. Et surtout pouvoir vivre un peu sans être dépendante de mes parents aussi. 

  6. Systèmes d'Information, en hyper simplifié, ce sont les personnes responsables de la circulation, du format et de l'enregistrement des données dans une entreprise. 

  7. Domain Driven Design, https://martinfowler.com/bliki/DomainDrivenDesign.html 

  8. J'emploie uniquement le terme raccourci « craft » pour des raisons anti-patriarcales, mais si tu veux en savoir plus sur le manifeste craft : https://manifesto.softwarecraftsmanship.org/ 

  9. Pareil, je vais extrêmement simplifier, mais l'urbanisme des SI, c'est la structuration de l'information dans une entreprise qui est comparable à l'urbanisme d'une ville, si on considère que l'architecture d'un projet info est un bâtiment. L'urbaniste fait en sorte d'orchestrer ces bâtiments dans l'entreprise (les personnes qui s'y connaissent, noraj de ma vulgarisation). 

  10. ~4 personnes sur de l'application back-end/front-end, ~4 personnes en data (python et rust). 

  11. Et puis bon, l'automobile n'est pas exactement le domaine le plus éthique. 

  12. Bon j'ai eu de la chance, dans la tech on embauche plutôt facilement et l'entreprise suivante était déjà intéressée, mais tout de même. 

  13. Et d'ailleurs, c'est triste de devoir le dire ainsi, le simple fait d'immaginer que pour montrer que quelque chose est vital, c'est de le comparer à l'importance du travail... On constate bien les dégâts immenses de générations d'endoctrinements à la sacro-sainte « valeur travail ». 

  14. Et il n'y a absolument aucun mal à cela, au contraire.